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Un article subjectif sur Nexus VI: la chronique de science-fiction qui ne manque pas d’air (dans l’espace)

Il y a des articles qui sont plus excitant que d’autres à écrire. Et à l’heure ou j’écris ces lignes, je suis plein d’effervescence.

Avant de vous parler des créateurs de contenus/vidéastes/influenceurs/ réalisateurs de films/cinéastes de Nexus VI/ youtubers, j’aimerai vous parler succinctement de la création vidéo sur internet.

Il est acté que la fiction sur Youtube n’a jamais fonctionné en dépit de nombreux investissements dans le secteur florissant du web. Mais à l’heure ou les vlogs dégustations ont la même valeur qu’un court métrage, l’ambition du Youtube Game est désormais partie en flambeaux.

L’audience a préféré les Youtubers aux Motionmakers, et s’intéresse désormais à des formats plus courts encore.

L’attention du spectateur s’efface dès l’instant où l’oeuvre se décide à lui montrer autre chose que des effets spéciaux sourds ou bien la star du moment gigotant sur un rythme aussi éphémère que sa présence.

Et dans ce déferlement de contenu se cachent parfois des pépites qui rêvent de changer notre perception de la création vidéo sur internet. Des gens qui veulent partager leur vision de l’audiovisuel tout en jouant avec les limites de leur média.

Laissez moi vous parler du Nexus VI

Selon Wikipédia, Nexus VI est une émission française spécialisée dans la science-fiction diffusée sur YouTube depuis décembre 2014.

Wikipédia a sûrement raison. Mais ce que l’encyclopédie libre oublie de préciser, c’est que c’est un projet à contre courant des manières contemporaines de consommer l’audiovisuel.

Le Trailer le plus fou de la SF Française – NEXUS VI

Porté par la société de production audiovisuelle de Metz appelé Fensch Toast, NEXUS VI raconte l’histoire du Cap’tain du vaisseau spatial éponyme et de son équipage. Ces personnages parcourent un univers de science fiction dans un futur lointain.

Le Cap’tain partage sa passion pour la science fiction sous toutes ses formes: films, séries, jeux vidéos, littérature… Le tout de manière référencée, et sur un ton humoristique. Durant de long moment, notre protagoniste évoque les oeuvres de science-fiction en argumentant son avis face caméra.

La différence principale étant que ses chroniques détournent le format de la vulgarisation Youtube en entrecoupant son discours par des séquences narratives qui permettent d’ajouter une dimension supplémentaire à son argumentaire.

Pourquoi c’est différent ?

L’un des atouts de la chaîne est d’abord son concept, qui profite d’une diégèse intéressante: le Capitaine s’adresse à nous du futur. Ce qui lui permet de jouer avec avec l’actualité en la décrivant rétrospectivement.

Mais ce n’est pas tout.

Le projet profite d’un soin tout particulier apporté à l’écriture qui jouit pleinement de son double sens: les séquences de fictions viennent étayer le propos de la partie chronique et la chronique vient appuyer la narration proposée dans l’aventure.

L’idée de coupler la chronique à la fiction n’est pas nouvelle puisqu’il existe depuis de nombreuses années des web créations qui ont cet objectif: Le CORONER sur la chaîne Chronik Fiction y prend également ses racines dans un format plus condensé mais accrocheur. Tout comme beaucoup de séries depuis le développement de la vidéo sur l’internet francophone et international.

J’aime la chronique-fiction sous toutes ses formes. L’une des productions que j’apprécie dans le même registre est Hyperdrive: un podcast audio dédié à Star Wars et ses influences SF, et au-delà. Un classique du genre qui relate les aventures de personnages originaux dans l’univers de Georges Lucas tout en y partageant leur passion pour cet univers.

Mais revenons à Youtube.

Les Chroniques du NEXUS VI effacent complètement l’amateurisme de leurs productions: pas d’effets spéciaux cheap (seulement dans les premiers épisodes, mais c’est visuellement très réussi), pas de face caméra dans une chambre mal éclairée, pas d’images pixelisées. Cela est sûrement une conséquence de la dimension professionnelle de cette activité puisqu’il s’agit avant tout d’une production issue du portfolio de Fensch Toast. Mais la qualité de l’oeuvre est au rendez vous. Que ce soit les effets visuels, les costumes ou les décors, tout a de la gueule.

Côté direction artistique, les aventures du Nexus VI sont narrées de manière organique: chaque aventure peut-être découverte sans avoir vu les épisodes précédents. Mais la partie la plus intéressante et celle qui découle tout droit de la culture internet: des vidéos intermédiaires dans lesquelles on découvre la réparation du vaisseau du Nexus VI. Dans une autre vidéo, on danse au rythme d’une musique « chantée » par Slexno, un membre de l’équipage.

Le clip « Joyeuses fêtes ».

La dimension internet se ressent d’autant plus dans les Review Breaks: des vidéos de réactions à chaud sur les sorties récentes et qui embrassent pleinement les standards de la scène « Critique Cinéma » de Youtube.

Critique de Star Wars: The rise of Skywalker

Mais encore une fois, l’équipe du Nexus VI ne fait pas les choses à moitié, et propose une double lecture en utilisant la critique partagée dans la vidéo comme élément de diégèse.

Malgré tout le bien que je pense de Nexus VI, il subsiste un défaut majeur qui est inhérent au concept de la chronique-fiction.

S’émanciper d’un avis pour mieux apprécier une histoire

Vous vous souvenez quand je vous disais en début d’article que la fiction sur internet n’est plus une priorité ?

La chronique-fiction a un problème: la chronique.

Je pense que les initiateurs de projets de chronique-fictions voient en ce format l’espoir de pouvoir raconter des histoires. Hélas, quand on écrit une chronique parlant d’une autre oeuvre, on choisit de se séparer d’office de son audimat.

Les gens qui n’aiment pas ou ne connaissent pas le sujet de la vidéo ne s’y intéressent pas.

Les gens qui s’intéressent au sujet mais qui n’aiment pas votre discours où votre contenu se brident lors du visionnage.

Les gens qui ne partagent pas votre avis vous haïssent.

En bref, on divise, et ce malgré la qualité du contenu produit.

Et c’est un frein supplémentaire à l’attachement du spectateur à l’histoire qu’on lui raconte, ou qu’on veut lui raconter. Bien qu’on puisse proposer un avis au travers d’une histoire, et sans chronique !

Finalement, pas besoin de noter explicitement le titre d’une oeuvre dans une vidéo pour partager son avis dessus. Par contre, ni Google ni Youtube ne vous relaieront.

Et paradoxalement, c’est une solution qui permet d’exister dans les algorithmes de recommandations, et d’aller chercher les futurs spectateurs de son histoire.

L’équipe du Nexus VI a compris qu’en voulant parler de science fiction sur un format tendance, elle agripperait de nouveaux spectateurs prêts à poursuivre l’expérience dénuée de références explicites à une oeuvre. En d’autres termes: l’audience ne regarderait pas NEXUS VI pour le sujet de la vidéo mais pour NEXUS VI.

Et la première tentative d’échapper à la chronique est une web série intitulée NEXUS VI: Legends. Une série de deux épisodes de 10 minutes en moyenne diffusée sur le web et dépeignant de nouvelles aventures exclusives de l’équipage.

Mais rapidement, l’ambition démesurée du projet a mobilisé plus de moyens. avec la réalisation d’épisodes plus impressionnants, plus aboutis et donc par définition, plus couteux et longs à produire.

« Abonnez-vous » vs « Bon visionnage »

Alors voilà. Le marché de la vidéo sur Youtube est compétitif. Il y a de nouveaux entrants chaque jours, qui ont de plus en plus de moyens.

Youtube a laissé sa place aux boites de productions qui se cachent derrière vos influenceurs préférés tandis que les jeunes, sans moyens financiers, sont restés dans leurs chambres à partager du contenu chez la concurrence.

Les Youtubers ont besoin de nouveaux atouts de différentiations permettant de rester dans une compétition dont les seuls gagnants sont des algorithmes de recommandation publicitaire. Alors les créateurs investissent dans une meilleure qualité d’image, un meilleur son et un meilleur montage. Ils évoluent dans l’objectif d’effacer l’amateurisme de leur début dans leurs nouvelles productions et prouver qu’ils sont encore dans la course.

Mais l’audiovisuel coûte cher. Et le public préfère peut-être votre chambre.

Il y a dix ans, des labels dédiés à la création de contenus pour le web français se lançaient avec Studio Bagel, Golden Moustache, Dix minutes à perdre… Tous ont été absorbés par les géants de l’audiovisuel: M6 pour Golder et Canal+ pour Studio Bagel, ou ont disparu dans le cimetière du web.

Les émissions et les fictions ont laissé place à des formats courts bien rodés et au brand content. Ce qui reste passionnant, mais qui privilégie la production quantitative à la qualité: la vidéo sur internet est encore et toujours une industrie.

Le modèle des plateformes sociales reposent sur leur soif d’interactions: il faut que l’utilisateur navigue et reste captif. Alors entre deux feat-n-fun, reste-t-il de la place pour un blockbuster venu du web ?

Où sont les web-créations ?

Depuis quelques années, les plateformes tentent d’inclure des fictions dans leur écosystème en les finançant, comme Youtube Originals, ou Snap Originals. Ces tentatives infructueuses laissent à penser que Youtube ne s’intéresse à la fiction que si elle apporte en audience, et rapporte en affichage publicitaire.

Mais quand je vois NEXUS VI lancer son projet de film pour les salles obscures, dans la lancé du film Le Visiteur du Futur. Je me demande si le vaisseau du Nexus VI ira côtoyer le Faucon Millénium, dans un futur où la science-fiction au cinéma ne se résume pas à de la franchise hollywoodienne.

La web série quitte son média millénials pour atterrir sur un média centenaire.

Et moi, j’espère enfin pouvoir quitter mon téléphone pour le grand écran: j’aurais moins mal aux yeux.

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